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Kafka

Dernière mise à jour : 29 mars 2020

1 – En sortant du concert elle retrouva Pierre ivre mort dans le caniveau. Il allait mal. Sa mine était pâle. Les secours, qu’elle avait alertés, avaient promis une intervention rapide.

Quelque peu rassurée, elle rentra chez elle avec sa famille. Le lendemain, elle apprit la nouvelle dans le journal. Il était mort dans la nuit. Les secours n’avaient rien pu faire.

Trop tard pour lui dire qu’elle l’aimait depuis le premier jour.

2 – Pierre gisait dans le caniveau. Il avait beaucoup trop bu. Il n’arrivait même plus à se lever. Il avait bien tenté pourtant mais il avait glissé pour retomber mollement.

Soudain un talon aiguille s’approcha de sa tête. Il la leva difficilement. Essaya de fixer une image qui se brouilla très vite.

On aurait dit que c’est elle. Comment cela était-il possible ? Il tenta de se concentrer pour mieux dévisager la femme qui se trouvait debout devant lui. « Et bien, cela n’a pas l’air d’aller ? ». Il ne reconnaissait plus la voix. La femme s’était baissée vers lui laissant entrevoir de jolies jambes. Amer, il laissa choir sa tête sur le trottoir. Il tomba.

3 – L’amour ? Comment pouvait-il répondre ? Lui qui n’avait jamais su construire une histoire stable. Il avait quitté sa femme au bout de quelques années ; ses compagnes le lassaient rapidement.

Mais elle ?... Celle que la vie lui avait fait rencontrer à quatre reprises. Celle avec laquelle il avait installé des distances. Pourquoi ? Par jeu ? Par flatterie ? Par orgueil ?

Ce soir elle était là, debout devant lui, avec ses talons aiguilles.

Dans son ventre il sentit la violence d’un coup de poing imaginaire. Ils avaient vraiment tout raté.

Chacun de son côté avait dérapé : elle, prostituée et lui alcoolique.

Il lui jeta un dernier coup d’œil et s’effondra.

4 – Amour amer.

S’avouer vaincu, la tête dans le caniveau !

Toujours il avait cru pouvoir jouer avec les autres. Sa séduction emportant tout sur son passage. Enfant il savait déjà prendre des distances avec l’amour inconditionnel de sa mère.

Enfant gâté, garçon charmant, garnement toujours excusé. Il savait profiter de l’amour que les autres lui prodiguaient sans jamais donner en retour. Un coeur sec. Tellement sûr d’être aimé.

Et elle ? Incapable de regarder en face ses sentiments. Incapable de les affronter. Son père lui avait appris à se forger une carapace. Se méfier des autres. Se protéger de l’amour et faire comme si.

Aujourd’hui ces deux là avaient tout raté. Tellement qu’en cet ultime moment ils ne pouvaient même plus se regarder en face et s’avouer enfin leurs amours.

Au bout du compte, demeuraient deux égos destructeurs de vies.

Dominique Thieffry

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