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Faire du lecteur un producteur de textes.
Roland Barthes

 

 

 

 

 

Patrick Modiano L’herbe des nuits.

Rencontrer des personnages pris sur le vif de leurs émotions. Allons chercher le flou, l’insaisissable du passé.

Depuis que j’écris ces pages, je me dis qu’il y a un moyen justement de lutter contre l’oubli. C’est d’aller dans certaines zones de Paris où vous n’êtes pas retourné depuis, trente, quarante ans et d’y rester un après-midi, comme si vous faisiez le guet. Peut-être celles et ceux dont vous vous demandez ce qu’ils sont devenus surgiront au coin d’une rue ou dans l’allée d’un parc ou sortiront de l’un des immeubles qui bordent ces impasses désertes. Ils vivent leur vie secrète.

1ère ouverture : 

 

Saisir sur le vif un court moment de vie. Imaginez une scène que vous pouvez décrire précisément. Comme vue de l’extérieur. Avec un narrateur -- vous --qui est véritablement spectateur. Pas d’affect, juste ce que le narrateur voit.

 

2ème ouverture :

 

Dans cette seconde ouverture, vous allez être le narrateur de votre histoire. Vous direz Je, comme Modiano. Vous vous pencherez sur votre passé, du temps de ce moment que vous avez décrit plus haut. Qui étiez-vous à cette époque ?

 

Je me sentais léger à cause du soleil et du ciel bleu de janvier. Les gratte-ciel n’existaient pas en 1964, mais ils se dissipaient peu à peu dans l’air limpide pour laisser place au café du Clair de lune et aux maisons basses du boulevard de la Gare. Les paulownias aux fleurs mauves de la place d’Italie… Je me répétais cette phrase et je dois avouer qu’elle me faisait monter les larmes aux yeux. En somme, j’étais revenu au point de départ. Je n’avais à cette époque aucun droit ni aucune légitimité. Pas de famille ni de milieu social bien défini. Je flottais dans l’air de Paris.

 

3ème ouverture :

 

Et de vos personnages, ceux qui entouraient le narrateur, que vous reste-t-il ?

Elle habitait à l’étage au dessus. A sa porte, un petit carton blanc où il était écrit à l’encre rouge son prénom : Kim. Elle avait à peu près le même âge que nous. Elle jouait dans une pièce et elle m’avait dit qu’elle avait toujours peur d’arriver en retard, après le lever de rideau. Par la fenêtre, je la voyais monter dans un taxi, vêtue d’une canadienne, et claquer la portière. Gestes qui étaient quotidiens et qui sont abolis, pièce de théâtre que personne ne verra plus jamais, rires et applaudissements perdus, théâtre lui-même qu’on a détruit.

Je vous entraine là dans les bribes du souvenir. Une image seulement. Rien n’est précis, un geste, un rire. De l’un, de l’autre.

4ème ouverture :

 

Revenons vers notre narrateur. A ce qu’il est aujourd’hui, quand il se penche sur son passé. Quels sentiments l’animent ? Ne les nommez pas, décrivez-les ! Par le biais d’une situation, ou de ce qu’il a compris ou retenu du passé.

Le bois, les avenues vides, la masse sombre des immeubles, une fenêtre éclairée qui vous donne l’impression d’avoir oublié d’éteindre la lumière dans une autre vie, ou bien que quelqu’un vous attend encore…tu dois te cacher dans ces quartiers-là. Sous quel nom ? Je finirai bien par trouver la rue. Mais chaque jour le temps presse, et chaque jour, je me dis que ce sera pour une autre fois.

 

La vie secrète

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